Magazine Savoir FCSSQ

Savoir hiver 2019 - Dossier : démocratie

La démocratie en 2019 : comment se déploie-t-elle ?

Malorie Flon
Directrice
du développement,
Institut du Nouveau
Monde (INM)

À l’instar de plusieurs sociétés occidentales, le Québec est confronté à un déclin de la participation électorale, et la tendance est particulièrement inquiétante chez les jeunes électeurs.

Selon plusieurs études, ce décrochage électoral traduit à la fois une perte de confiance envers la classe politique, et le renforcement du sentiment selon lequel le vote n’induit pas de réel changement. Les résultats d’un sondage Léger/Institut du Nouveau Monde mené en juin 2018 1 montrent toutefois que les jeunes électeurs sont attachés à la démocratie, qu’ils ont envie de se sentir utiles et qu’ils s’engagent à l’extérieur des partis politiques.

 


« La démocratie ne consiste pas à mettre épisodiquement un bulletin dans une urne, à déléguer les pouvoirs à un ou plusieurs élus, puis à se désintéresser, s’abstenir, se taire pendant cinq ans. Elle est l’action continuelle du citoyen. » Pierre Mendès France, La République moderne, Gallimard, 1992.


 

État de la démocratie québécoise

Qu’est-ce que cela signifie pour la démocratie au Québec ? Toute la pertinence de la participation citoyenne réside dans ce diagnostic de notre époque et de notre société : les enjeux sont plus complexes que jamais et les gouvernements ne pourront les résoudre seuls; les citoyens sont de plus en plus friands de rapports horizontaux plutôt que hiérarchiques; la distinction individuelle est plus valorisée que l’appartenance à un tout; et la démocratie représentative est remise en question, tendance qui s’observe par le déclin de la participation électorale.

Ce diagnostic hausse la participation citoyenne au statut de voie de passage – voire d’injonction – ayant comme objectif de renforcer la démocratie.

 


Qu’est-ce que la participation citoyenne ?

La participation citoyenne peut être comprise comme englobant trois types de participation qui se complètent et qui se combinent : la participation électorale, qui consiste à exercer son droit de vote ou à se porter candidat; la participation publique, qui consiste à participer à des processus formels, initiés ou non par l’État, mais ayant pour but d’éclairer la prise de décision publique; et la participation sociale, qui consiste à s’engager dans des groupes ou projets informels au bénéfice de sa communauté (bénévolat, associations, syndicats, etc.)


 

L’importance de toutes les formes de participation

L’une sans l’autre, les différentes formes de participation citoyenne nous laisseraient face à une démocratie bancale. Comme il est impossible de gouverner à huit millions de personnes, la participation électorale est au coeur de notre système politique et reste d’une importance cruciale pour assurer la légitimité de nos institutions et l’exercice démocratique du pouvoir.

La participation publique et la participation sociale jouent aussi un rôle fondamental. La participation publique éclaire le travail des décideurs qui ne sont pas des experts, mais des citoyens comme les autres, devant informer leurs décisions d’une compréhension fine et équilibrée des besoins et des aspirations exprimés par la population. La participation sociale est quant à elle garante d’un sentiment d’appartenance à la communauté, d’un lien social nourri par différentes formes de solidarité.

Et la démocratie scolaire ?

Qu’est-ce à dire pour la démocratie scolaire ? Le taux de participation de 4,86 % enregistré aux dernières élections scolaires rend l’enjeu complexe. Difficile de faire valoir la légitimité des commissaires élus, malgré l’intérêt de ce mécanisme démocratique. Ce constat, ainsi que les intentions prêtées à l’actuel gouvernement, nous invite à rouvrir le débat sur la démocratie scolaire.

Comment instruire, socialiser et qualifier équitablement, et faire en sorte que l’école québécoise reste toujours proche des besoins en évolution de nos élèves ? Soulignons que la vie démocratique des écoles ne se limite pas aux élections scolaires. Elle bénéficie d’autres formes de participation, tels les conseils d’établissement, les comités de parents et les conseils d’élèves. On peut même argumenter que les milieux scolaires sont exemplaires en termes de combinaison de formes de participation citoyenne complémentaires. Ainsi, comme le signalait le Conseil supérieur de l’éducation dans un avis de 2006 2 puis de nouveau en 2016 3 : pensons-y à deux fois avant de supprimer un palier démocratique tel que les élections scolaires. D’autres solutions ont-elles bien été envisagées ? Telles que le jumelage des élections scolaires et municipales, qui a été associé à une hausse de participation dans d’autres provinces canadiennes ?

Pour plus de détails sur les résultats

 

 

 

Gardons en tête que c’est la coexistence et la combinaison de plusieurs formes de participation citoyenne qui enrichissent la vitalité démocratique du Québec. •

 


  1. Sondage Web réalisé du 6 au 12 juin 2018 auprès de 1500 Québécois de 18 à 35 ans.
  2. Conseil supérieur de l’éducation. Agir pour renforcer la démocratie scolaire, 2016.
    https://www.cse.gouv.qc.ca/fichiers/documents/publications/CEBE/50-0184-01.pdf
  3. Mémoire du Conseil supérieur de l’éducation concernant le projet de loi no 86 visant à modifier l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires. Mars 2016. http://www.cse.gouv.qc.