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Été 2017

L’alphabétisation en 2017

| Par Myriam Désourdy, chargée aux communications et événements à la Fondation pour l’alphabétisation

À l’ère des médias sociaux et dans notre société basée sur la communication et le savoir, il peut être difficile de croire que 53 % des Québécois âgés de 16 à 65 ans ont de la difficulté à lire en vue d’apprendre, de comprendre et d’agir en toute autonomie. Il semble également invraisemblable que le Québec se classe à l’avant-dernier rang des provinces canadiennes en ce sens, alors que le Canada affiche l’un des plus hauts niveaux de scolarité au monde.

Évidemment, ce constat est peu glorieux et plusieurs chercheurs se sont penchés sur cette problématique de société. Comment expliquer cet état de fait, considérant que dans notre province, l’école est obligatoire jusqu’à l’âge de 16 ans ?

Même si le Canada figure au sommet des pays les plus scolarisés, nous y remarquons une faible progression des compétences en littératie. Ce terme est défini par l’OCDE comme désignant « L’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d’étendre ses connaissances et ses capacités. » On fait même état d’une perte de compétences au cours du cycle de vie des Québécois. Force est de constater que le continuum d’acquisition de connaissances diminue avec l’âge et que cette baisse est plus importante une fois le cycle éducationnel terminé.

Pour plusieurs, l’obtention d’un diplôme signifie, malheureusement, la fin d’un chapitre ainsi que la fermeture du dernier livre. La pratique de la lecture est associée, tant bien que mal, au cadre scolaire. Une fois la personne active sur le marché du travail, cette pratique semble dévalorisée par plusieurs. De fait, un grand nombre d’études démontrent que l’accès à la formation post-scolarisation joue un rôle de premier plan pour le maintien des compétences. Il en va de même pour toutes les  activités entourant la littératie. Cet état de fait peut être comparé à l’activité physique : moins nous pratiquons un sport, plus notre corps perd ses aptitudes à l’exercer.

Malheureusement, il est aussi démontré que les personnes analphabètes valorisent peu l’éducation ou la lecture en famille, ce qui entraîne souvent la transmission intergénérationnelle de l’analphabétisme. C’est pourquoi plusieurs programmes de la Fondation pour l’alphabétisation, comme La lecture en cadeau, visent à améliorer les compétences en lecture et en écriture de tous les membres de la famille, parents et enfants. Lire avec son enfant et l’accompagner tout au long de sa scolarité donne souvent des résultats satisfaisants. Il faut savoir que l’alphabétisation commence dès la naissance alors que les tout-petits font leurs premières expériences avec les mots, notamment par mimétisme. La façon d’agir avec nos enfants est donc primordiale pour le développement de leurs capacités à lire et à écrire. Il suffit de prendre un moment pour lire avec eux, discuter ou simplement de faire un dessin en leur compagnie.

La pratique de la lecture doit donc demeurer une activité primordiale à travers toutes les étapes de la vie. Qu’il s’agisse de faire la lecture aux tout-petits, de la promouvoir auprès des enfants, de créer des activités de lecture et d’écriture chez les adolescents ou encore d’offrir des ressources de mise à niveau pour les adultes, la lecture et l’écriture composent la clef de voûte de notre société. Elle doit faire partie des saines habitudes de vie, au même titre que bien mange et faire du sport.

Enfin, comment pouvons-nous conjuguer nos efforts pour rompre le cycle de l’analphabétisme ? Plusieurs pistes sont envisageables. Parmi elles figurent la formation de base et le transfert des connaissances en entreprise (entre les travailleurs à l’aube de la retraite et les employés de tous âges), le soutien aux familles afin de prévenir le décrochage scolaire et les ressources accordées aux jeunes provenant de milieux défavorisés pour leur permettre d’étudier. Concrètement, vous pouvez aussi agir dans votre quotidien en offrant un livre neuf au programme La lecture en cadeau de la Fondation pour l’alphabétisation. Ces livres sont remis annuellement à plus de 50 000 enfants de 0 à 12 ans vivant dans des milieux défavorisés partout au Québec. Nous devons conjuguer nos efforts pour vaincre l’analphabétisme et ses répercussions. C’est un livre à la fois qu’ensemble, nous pouvons faire une différence.•


Source 1 : Développer nos compétences en littératie : un défi porteur d’avenir, Rapport québécois de l’Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (EIACA), 2003, Québec, Institut de la statistique du Québec, 256 pages.

Source 2 : Statistique Canada, Enquête internationale sur l’alphabétisation et les compétences des adultes (Canada) : Fichier de microdonnées à grande diffusion. Compilation : Institut de la statistique du Québec.