Magazine Savoir FCSSQ

Mars 2017

Le transport actif gagne du terrain

| Par Françoix Marcil de Vélo Québec

Tous les cinq ans depuis 1995, Vélo Québec brosse un portrait détaillé des cyclistes québécois. Pour ce faire, l’organisme commande à la firme Léger un sondage sur la pratique du vélo à l’échelle de la province et analyse les enquêtes Origine-Destination réalisées dans les grands centres urbains du Québec. Les résultats les plus récents, dévoilés l’an dernier dans l’étude L’état du vélo au Québec en 2015, révèlent que 4,2 millions de personnes font du vélo au Québec, soit un individu sur deux. C’est beaucoup quand on constate, par exemple, qu’en Australie ou aux États-Unis1, à peine le tiers de la population utilise un vélo. Toutes proportions gardées, il y a donc une fois et demie plus de cyclistes ici que dans ces deux pays, dont le niveau de richesse et de développement est semblable à celui du Québec, mais dont le climat est généralement plus propice au vélo.

Les résultats concernant la pratique chez les jeunes sont intéressants. On constate d’abord que la baisse marquée du taux de jeunes cyclistes observée de 2005 à 2010 a été freinée, si bien qu’on en trouve aujourd’hui plus qu’en 2010. Il y a donc maintenant un million de jeunes de 3 à 17 ans qui s’adonnent au vélo. Cela représente neuf enfants sur dix dans la tranche des 6 à 13 ans et trois adolescents sur quatre chez les 14 à 17 ans ! Mieux encore, les jeunes font du vélo souvent : de mai à septembre, ils roulent en moyenne quatre heures par semaine et plus de 69 % d’entre eux en font une activité hebdomadaire récurrente. De fait, le vélo est plus qu’un loisir pour eux, comme c’est le cas pour les adultes : que ce soit pour aller à l’école, pour visiter des amis ou pour se rendre au parc, deux jeunes cyclistes sur trois au Québec utilisent leur vélo aux fins de transport.

À PIED, À VÉLO, VILLE ACTIVE

L’implantation du programme À pied, à vélo, ville active (précédemment Mon école à pied, à vélo), qui contribue à la promotion du vélo et des  aménagements facilitant sa pratique, n’est pas étrangère à la popularité de ce mode de transport chez les jeunes au Québec. Depuis sa création par Vélo Québec en 2005, À pied, à vélo, ville active s’est implanté très largement sur le territoire en rejoignant 730 000 jeunes et parents dans 1 040 écoles primaires et 313 écoles secondaires. Chacune d’entre elles possède aujourd’hui un plan de déplacement de ses élèves, accessible en ligne, assorti de recommandations pour favoriser le transport actif des jeunes vers l’école. Le programme À pied, à vélo, ville active, qui couvre l’ensemble du Québec grâce à son réseau de mandataires régionaux expérimentés et dynamiques, est l’un des plus développés en Amérique du Nord.

À pied, à vélo, ville active obtient du succès en encourageant le transport actif et en proposant des solutions visant à faciliter les déplacements des parents et de leurs enfants entre le domicile, l’école et le travail. L’expansion du réseau cyclable et la mise en place de mesures de modération de la circulation par les municipalités figurent parmi les initiatives valorisées par ce programme. Au-delà du nombre important de personnes rejointes, un indicateur intéressant est l’influence du programme sur le taux de pratique du
transport actif. Dans des sondages réalisés sur une période de trois ans auprès des enfants de Montréal, de la Montérégie et de Chaudière-Appalaches, on note une augmentation des déplacements à pied (9 %) et à vélo (7 %) vers l’école, parallèlement à une diminution de l’utilisation de l’automobile (–7 %) et de l’autobus scolaire (–7 %).

Mais il y a encore place à l’amélioration. Voulant aider les commissions scolaires à faire face aux nombreux défis qui persistent dans l’augmentation de la part modale des déplacements actifs vers l’école, Vélo Québec a produit à leur intention la Charte en faveur du transport actif (voir l’autre texte). À ce jour, les commissions scolaires Marguerite-Bourgeoys, de Montréal, de la Capitale et de Laval l’ont adoptée.

DES VILLES AUX QUARTIERS HUMAINS

Les villes québécoises qui s’appliquent à redonner une dimension humaine aux quartiers sont de plus en plus nombreuses. Cette tendance mondiale se traduit chez nous par l’adoption de politiques et de mesures qui mettent en valeur le transport actif. En fait, la majorité des Québécois résident dans une municipalité qui compte le vélo dans ses politiques de transport. En 2015, deux personnes sur trois habitaient une ville dont les politiques préconisent l’aménagement de nouvelles voies cyclables et la réduction de la pression automobile par des mesures de modération de la circulation. Les municipalités deviennent ainsi des acteurs de premier plan dans le développement du transport actif.

LA CRAINTE DES PARENTS

Il demeure toutefois que le principal obstacle à l’augmentation du transport actif vers l’école est la crainte des parents de voir leur enfant circuler à vélo dans la rue. Pour les convaincre de changer d’idée, il faut sécuriser les abords de l’école, ralentir la circulation dans les quartiers résidentiels et réaliser des aménagements cyclables pour protéger les enfants, ce qui demande la collaboration de la direction de l’école et de la municipalité. Ces changements se font rarement rapidement.

Une des façons de sécuriser les parents est d’aider les jeunes à développer leurs habiletés à se déplacer à vélo sur la chaussée. Pour y arriver, Vélo Québec a lancé en 2015 le programme Cycliste averti. Celui-ci fait appel au milieu scolaire pour atteindre l’ensemble des jeunes, mettant à contribution les enseignants titulaires et d’éducation physique pour transmettre les aptitudes concrètes et le bagage théorique essentiels à une pratique sécuritaire. Il se conclut par un exercice en milieu routier réel, encadré par du personnel formé par Vélo Québec. Ce nouveau programme permet le développement de compétences sociales, intellectuelles et physiques chez les élèves dans le cadre d’un projet interdisciplinaire novateur, pratique et actif dont l’objectif est la pratique autonome et sécuritaire du cyclisme en tant que moyen de transport actif au quotidien. Il développe des compétences chez les enfants et rassure les parents.

Bref, les choses bougent. Les municipalités s’impliquent de plus en plus pour favoriser le développement du transport actif en réalisant des aménagements cyclables sécuritaires qui rassurent les parents et facilitent l’accès à l’école à vélo ou à pied. Vélo Québec, qui anticipe un bel avenir pour Cycliste averti, prévoit de former 4 500 élèves du troisième cycle du primaire dans les trois prochaines années. Quant aux écoles, elles auront besoin d’un soutien additionnel pour poursuivre leur travail. Les commissions scolaires peuvent notamment les aider et envoyer un message clair aux parents en adoptant la Charte en faveur du transport actif. En mettant la main à la pâte, il est possible de convaincre encore plus de jeunes et leurs parents de choisir le transport actif.


LE TRANSPORT ACTIF

Le transport actif est une forme de locomotion où l’énergie motrice est apportée par l’individu qui se déplace pour un motif utilitaire. Plus qu’une simple façon de se déplacer, le transport actif est une saine habitude de vie, une activité physique informelle s’intégrant au quotidien et permettant de vivre de manière sensible dans son environnement.

LES AVANTAGES DU TRANSPORT ACTIF

  • Le transport actif est une activité physique simple, agréable et accessible qui aide les élèves à atteindre les 60 minutes par jour d’activité physique qui leur sont recommandées.
  • Les enfants actifs quotidiennement sont en meilleure forme physique et plus attentifs en classe.
  • Les enfants qui effectuent des déplacements actifs développent davantage leur autonomie.
  • Le transport actif permet une diminution de la circulation automobile et de la pollution près de l’école.
  • Des accès sécuritaires pour les piétons et les cyclistes aux abords de l’école permettent de rassurer les parents.
  • L’aménagement des rues nécessaire pour sécuriser les déplacements actifs enrichit la vie de quartier et favorise la rétention des familles.

UNE CHARTE EN FAVEUR DU TRANSPORT ACTIF

La Charte en faveur du transport actif est un appel au réseau scolaire du Québec pour qu’il intensifie son engagement et ses actions au profit des déplacements actifs. Elle invite les commissions scolaires à reconnaître l’effet positif du transport actif sur la vie des jeunes. Elle encourage aussi les écoles à intégrer l’enseignement de notions relatives au transport actif et à communiquer à leur commission scolaire ou à leur municipalité leurs préoccupations concernant l’accessibilité à leur établissement en mode actif.

Mise en ligne en octobre 2016 durant le Mois international Marchons vers l’école, la Charte a déjà suscité l’intérêt d’une centaine d’organisations : commissions scolaires, cégeps, ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur, directions de santé publique, municipalités et écoles. On peut la télécharger ici. •

 

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1 L’absence de données à l’échelle des provinces ne permet pas de comparer le Québec avec le reste du Canada.