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Réussite des élèves

Réussite scolaire ou réussite éducative

| Par Par Jean Jacques Demba, Ph. D., enseignant de didactique à l’ENS, chercheur au GRESHS, Libreville, chargé de cours à l'Université Laval et chercheur associé au CRIRES et Thérèse Laferrière, responsable du Réseau Périscope

La réussite scolaire rattachée exclusivement à la performance scolaire, souvent associée aux notes et à l’obtention du diplôme à la fin d’un parcours de formation, peut être limitative pour mieux comprendre certains parcours scolaires et accompagner les élèves considérés en rupture avec l’institution scolaire. Parler de réussite éducative est une manière d’ouvrir un chantier sur la révision de la définition institutionnelle de la réussite scolaire en vue de répondre à certains enjeux sociaux et sociétaux actuels.

La réussite scolaire : une définition institutionnelle étroite

La notion de réussite scolaire est associée à la conformité aux normes scolaires lesquelles mettent en exergue les notes, les résultats aux examens, le passage en classe supérieure et l’obtention des diplômes. Ainsi, elle induit l’élève à la performance pour obtenir des choses qui ne lui appartiennent pas au départ, des choses auxquelles il a parfois de la difficulté à produire du sens, à avoir du plaisir. L’expérience scolaire d’un jeune québécois que relate la chercheure Garakani (2016) est éloquente en ce sens. Il s’agit d’un élève inuit souvent absent et quand il est à l’école il est désintéressé des tâches scolaires en classe. En dépit de l’accompagnement de l’enseignant dans son apprentissage, il n’acquiert que très peu de savoirs et de savoir-faire scolaires. Hors du contexte scolaire, et plus spécifiquement dans sa famille, le même élève s’occupe de ses frères et sœurs, va à la chasse et à la pêche pour collecter la nourriture pour plusieurs maisons de sa communauté. Il fait preuve de leadership et est décisif. C’est tout un autre individu qu’on voit en classe. Cet élève est-il en réussite ou non ? Qu’est-ce qu’on considère comme succès dans cette expérience du jeune ? L’expérience de ce jeune inuit montre le caractère étroit de la définition institutionnelle de la réussite scolaire : faut-il étiqueter cet élève qui s’intéresse peu aux savoirs scolaires, qui se sent mal à l’école ou qui ne manifeste pas les compétences attendues en classe ? 

Par ailleurs, à la performance scolaire s’ajoute le mérite, où la récompense est donnée à l’élève, et inversement la responsabilité lui incombe en partie de ne pas avoir réussi (Demba, 2016 ; Paquelin, 2016 ; Rousseau, 2016). Pensée de façon verticale (normes, rapports de pouvoir), la question de la réussite scolaire et plus globalement celle du rapport à l’apprentissage et à l’école soulèvent beaucoup de critiques, particulièrement de la part de ceux et celles qui sont concernés au premier chef, soit les élèves. En effet, autant au secondaire qu’au postsecondaire, les jeunes remettent en question la valeur et le sens de leur réussite, en remettant en cause le curriculum qui leur est imposé et surtout la façon imposée de l’apprendre. Ce n’est pas tant l’idée d’apprendre quelque chose qui pose problème, mais de l’apprendre de la même façon et d’être évalué de la même façon (Rousseau, 2016). Dans la même veine, le récit des jeunes entrepreneurs sortis des écoles québécoises est illustratif. Selon eux, ce qu’ils ont appris à l’école n’a pas été suffisant pour leur permettre de s’épanouir. Ils ne rejettent pas l’école, mais constatent qu’il leur manque la réussite éducative (De Courcy, 2016).

La réussite éducative : un chantier promoteur des enjeux sociaux et sociétaux actuels

Cette expression, plus large, comprend le développement du plein potentiel du jeune qui n’exclut pas la réussite scolaire. Autrement dit, elle englobe l’intégration de savoirs académiques, l’acquisition d’attitudes et de valeurs utiles au fonctionnement en société, le développement des compétences nécessaires à l’insertion professionnelle et la réussite d’objectifs personnels (autonomie, bien-être, mobilité sociale, etc.). (Demba, 2016; Rousseau, 2016).

Les participants du premier colloque du réseau PÉRISCOPE, tenu dans le cadre du congrès de l’ACFAS en mai 2016, ont conclu qu’il s’imposait de revisiter la notion de réussite scolaire afin de mieux comprendre les parcours scolaires des jeunes, les accompagner dans leurs apprentissages, donner du sens à ces apprentissages et favoriser la réussite éducative.

En suivant ce lien, vous trouverez les références ci-dessus mentionnées. La documentation s’enrichira au cours de l’été en vue de tenir un tel chantier à l’automne, et de manière harmonisée avec la consultation sur la réussite éducative qui s’annonce. À cet automne !