Magazine Savoir FCSSQ

Mars 2016

Pour que l’éducation devienne une réelle priorité

| Par Josée Bouchard, présidente de la FCSQ

photo_presidente-FCSQ-2014-2015-WEBL’éducation doit être une priorité. À force de l’entendre, cette affirmation est malheureusement devenue galvaudée. Au-delà des formules convenues, la prétention que l’éducation est une priorité, pour se concrétiser, doit être accompagnée de moyens. Il y a le financement bien sûr, mais il faut aller plus loin. La FCSQ a mis sur la table une proposition pour une Politique nationale en éducation publique qui serait, selon nous, l’outil par lequel le gouvernement démontrerait que l’éducation est une réelle priorité.

Au moment où le premier ministre souhaite envoyer un signal fort en faveur de l’éducation au Québec, nous lui réitérons cette proposition avec un rappel de la démarche rigoureuse qui a précédé l’adoption de la plateforme en vue de l’élaboration d’une Politique nationale en éducation publique par la FCSQ en 2012.  Elle est le résultat de consultations auprès de plus de 1 500 partenaires des commissions scolaires provenant des milieux économique, municipal, de la santé et du domaine social ainsi que des représentants syndicaux et des parents.

Revoir les façons de faire

Après avoir subi plus d’un milliard de compressions les six dernières années, l’école publique a mal. La population ne croit plus le gouvernement lorsqu’il prétend que ces coupes n’ont pas affecté les services aux élèves, et avec raison. Et maintenant que l’équilibre budgétaire est atteint, on s’empresse d’annoncer un réinvestissement en éducation. La FCSQ sera très vigilante au cours des prochains mois afin de valider que le réinvestissement annoncé dans le budget 2016-2017 est bel et bien au rendez-vous. Il faudra notamment s’assurer que les sommes dédiées au réseau scolaire vont au-delà des coûts de système, incluant les mesures contenues dans les nouvelles ententes de conventions collectives. Mais même si réinvestissement réel il y a, ce n’est pas suffisant. Il faut revoir nos façons de faire et nous sommes d’avis qu’une Politique nationale assurerait la pérennité du financement du système public d’éducation.

Il faut que le ministère de l’Éducation se penche sur la question des enveloppes ciblées par exemple. Tous les acteurs du réseau le décrient, la marge de manœuvre des commissions scolaires et de leurs écoles est devenue quasi inexistante avec la combinaison des compressions et de la multiplication des mesures ciblées. Un problème qui risque de s’accentuer avec le projet de loi no 86, Loi modifiant l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires* présentement à l’étude à l’Assemblée nationale, qui prévoit de nouveaux pouvoirs de directives du ministre.

Au contraire, si le gouvernement est sérieux lorsqu’il dit vouloir décentraliser la prise de décision vers les écoles, il faut qu’il mette à la disposition des commissions scolaires des enveloppes non ciblées pour permettre aux écoles de réaliser des projets locaux en lien avec la réussite et la persévérance scolaires de leurs élèves.

Les orientations et décisions en éducation doivent aussi s’appuyer sur les données probantes de la recherche pour donner des résultats. C’est pourquoi nous avons demandé à plusieurs chercheurs et experts de faire le point sur l’état des connaissances en matière de réussite des élèves pour cette édition du magazine. Les bienfaits de la maternelle à 4 ans en milieu défavorisé semblent faire l’unanimité par exemple, et le Québec semble bien engagé dans cette voie, avec la pleine collaboration des commissions scolaires avec leur milieu.

La réussite est l’affaire de tous !

Par ailleurs, un des principes à la base de la plateforme pour l’élaboration d’une Politique nationale et un fondement même de notre système public d’éducation est la présence d’une gouvernance démocratique, laquelle est menacée de disparition par le projet de loi no 86. La présence d’élus au suffrage universel à la tête des commissions scolaires permet d’avoir une école à l’image des besoins de son milieu, mais surtout, l’accessibilité au système public d’éducation et l’égalité des chances pour tous par le biais d’une redistribution équitable des ressources.

Je suis très inquiète des dérives que pourrait entraîner le projet de loi no 86 s’il est adopté dans sa forme actuelle. Comment pourrons-nous prétendre faire de l’éducation une priorité nationale si les futurs conseils scolaires deviennent des comités d’usagers excluant une partie de la population, et que tous ne pourront plus s’exprimer sur le système public d’éducation qu’ils désirent ? La réussite des élèves est l’affaire de tous ! Elle passe par la mobilisation de toute la communauté et ce sont les élus scolaires qui donnent l’impulsion et qui sont les catalyseurs de cette mobilisation vers un seul objectif, la réussite de nos élèves.


Si le gouvernement est sérieux lorsqu’il dit vouloir décentraliser la prise de décision vers les écoles, il faut qu’il mette à la disposition des commissions scolaires des enveloppes non ciblées pour permettre aux écoles de réaliser des projets locaux en lien avec la réussite et la persévérance scolaires de leurs élèves.


 

 

* Projet de loi no 86 – Loi modifiant l’organisation et la gouvernance des commissions scolaires en vue de rapprocher l’école des lieux de décision et d’assurer la présence des parents au sein de l’instance décisionnelle de la commission scolaire.